Nous continuons notre tour d’horizon des immeubles parisiens, toujours en nous appuyant sur l’étude commandée par la ville de Paris à l’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR). Dans cet article, nous nous intéressons aux bâtiments construits dans l’entre-deux guerre : entre 1918 et 1939.
Ces copropriétés représentent environ 17% copropriétés parisiennes.
Le contexte des copropriétés parisiennes construites entre 1918 et 1939
Les usines installées durant la guerre ont fait de Paris la première ville industrielle française. En 1939, un tiers de la population est ouvrière. A la sortie de la guerre, la capitale fait face à une crise du logement (l’histoire est souvent cyclique…) : d’une part, les matériaux manquent (et sont donc très chers) et, d’autre part, avec l’inflation, les capitaux sont dirigés vers des valeurs spéculatives plutôt que vers la construction de logement. Entre 1914 et 1939, les coûts de construction sont multipliés par 10 !
Pourtant, après la guerre, il y a une réelle volonté de construire des logements sains aérés et ensoleillés, pour tous.
Durant cette période, de nombreux logements sociaux de type “habitations à bon marché” sont construits dans la capitale, principalement autour des boulevards maréchaux. Des sociétés comme la RIVP, Elogie sont ainsi créées durant cette période.
L’autre grande catégorie d’immeuble construit durant l’entre-deux guerre, est les immeubles de standing.
Caractéristiques architecturales
Les immeubles HBM sont construits avec des cours intérieures qui sont ouvertes sur les voies publiques. La façade sur rue du bâtiment n’est donc pas continue. Les façades sur cours et sur rue sont constituées des mêmes matériaux.
Etant donné (i) les pertes humaines rencontrées pendant la guerre, et donc les pertes de main d’oeuvre associées, et (ii) le coût élevé des matériaux, des matériaux plus économes sont utilisés pour la construction des immeubles HBM : la brique et le béton. C’est également le début du béton armé (béton renforcé avec une ossature métallique). Avec le béton, l’ossature a un rôle structurel plus conséquent, au détriment de la façade qui était auparavant “porteuse”
Les immeubles HBM sont en R+5 ou R+6. La ventilation est naturelle, les menuiseries sont en PVC. Les appartements sont traversants. Les toitures sont en zinc, en tuile ou en béton armé.
Pour les immeubles de standing, les matériaux utilisés en façade sont plus variés. Mais le remplissage est en béton ou en brique. La ventilation est également naturelle et les toitures sont faites avec les mêmes matériaux.
Analyse thermique du bâti
Avant 1925, les façades sont porteuses. Elles sont épaisses et présentent peu de ponts thermiques. La performance du bâti est relativement bonne.
Après 1925, la façade n’est plus porteuse, c’est l’ossature en béton ou béton armé qui joue ce rôle. Les façades sont donc plus fines, et les performances thermiques de la façade sont moins bonnes.
Les ornements des façades (dont les balcons) créent des ponts thermiques : zones où il y a des fuites thermiques, comme on peut le voir ci-dessous.
Sur rue, pour faire face au bruit, les menuiseries simple vitrage ont parfois été remplacées par des menuiseries double vitrage.
Ces bâtiments ont été construits avec des matériaux lourds qui ont une bonne inertie thermique : en été, il faudra attendre un certain temps avant que la température des murs soit égale à la température extérieure. C’est une caractéristique avantageuse en cas d’épisode de canicule comme on en a connu cette année.
Dans 60% des cas, le chauffage est collectif (gaz, fioul, CPCU). Dans 40% des cas, il est individuel (électrique ou gaz).
L’étiquette énergétique ce ces immeubles
Quelle étiquette énergétique pour ces bâtiments ? Les immeubles avec un chauffage collectif au gaz peuvent avoir une étiquette D. Pour les autres, l’étiquette atteinte sera entre E et G.
Comment améliorer la performance énergétique des bâtiments ?
L’isolation des façades
La valeur patrimoniale de ces immeubles est très variable. Schématiquement, les immeubles construits avant 1930 ont un niveau d’ornementation en façade assez développé. L’isolation extérieure sera difficilement envisageable. Pour ceux construits après 1930, et notamment ceux qui n’ont pas de brique apparente, l’isolation par l’extérieure sera envisageable.
Pour les immeubles d’avant 1930, peut-on envisager une isolation thermique par l’intérieure ? Un point d’attention à avoir : l’isolation par l’intérieur peut provoquer de la condensation dans les murs ou dans l’isolant. Un pare-vapeur doit a minima être installé. Second point d’attention : la perte de l’inertie thermique qui n’est pas souhaitable en période de canicule.
En complément de l’isolation, l’installation d’une ventilation mécanique contrôlée sera nécessaire.
Isolation des combles
L’isolation des combles est une mesure simple pour améliorer légèrement la performance énergétique d’un bâtiment.
Remplacement des équipements de chauffage
S’ils sont très vieux, les équipements de chauffage peuvent être remplacés. A minima, pour les logements collectifs, on peut envisager un équilibrage des réseaux pour améliorer la performance du bâtiment.
On peut déplacer les radiateurs situés sur des murs qui donnent sur l’extérieur.
Changer les vitrages
Les vitrages en simple vitrage peuvent être remplacés par des double vitrage (si cela n’a pas déjà été fait)
Des travaux, pourquoi pas. Mais à quel coût ? Et pour quels gains ?
Voici venu le temps des questions délicates, et dans le même temps clefs.
Nous n’apporterons pas de réponse précise. Nous allons tout de même vous donner une fourchette pour avoir des ordres de grandeur en tête.
Supposons que nous engageons le programme travaux suivant :
- Isolation thermique par l’extérieur des façades
- Mise en place d’une ventilation mécanique contrôlée
- Isolation des combles
- Remplacement des simple vitrage en double vitrage.
- Remplacement du système de chauffage
Ces travaux, conséquents, permettront un gain énergétique de 35%, qui débloque certaines aides.
Pour quel coût ? Prenons une fourchette, sur la base des projets recensés par CoachCopro, nous plaçons la fourchette basse à 15 000€/logement, et la fourchette haute à 35 000€/logement. Evidemment, ce sont des coûts moyens, le coût réel dépend de nombreux paramètres dont la taille de l’appartement. Notez que pour des petites copropriétés (moins de 10 logements), cette fourchette devrait certainement être revue à la hausse.
Vous trouverez ci-dessous la synthèse, qui prend en compte :
- Les aides nationales
- L’exonération de taxe foncière sur 3 ans
- La plus-value liée à la valeur verte du logement. 2% à Paris entre un appartement avec une étiquette F ou G et un appartement avec une étiquette D
- Le recours à l’éco-prêt à taux zéro
On voit que pour certaines rénovations, en prenant en compte les aides, l’exonération de la taxe foncière et la valorisation du patrimoine, l’opération est bénéficiaire ! Dans les cas où la quote-part travaux est plus élevée, le reste à charge est de l’ordre de 15 000€ pour un logement. Ce qui représente un effort mensuel moyen (hors exonération de taxe foncière et hors valorisation de patrimoine) de 130€/mois sur 15 ans.
Une autre manière de regarder ces résultats : les aides (aides collectives et exonération de taxe foncière) représentent entre 26% et 41% du coût des travaux ! Vous n’êtes jamais autant aidé lorsque vous réalisez d’autres travaux !
Une comparaison que l’on n’a pas faite mais à avoir en tête lorsque vous prenez une décision sur la rénovation de votre immeuble : comparer le coût du ravalement qui embarque la rénovation énergétique avec le coût du ravalement simple. On peut parfois être surpris de l’écart (dans le bon sens !)
A noter, d’autres dispositifs d’aides existent. Pour les propriétaires bailleurs, certains dispositifs existent. Pour les propriétaires occupants aux ressources modestes et très modestes (cf tableau de ressources ci-dessous), des aides individuelles peuvent également être sollicitées. La ville de Paris propose aussi certaines aides : à l’heure actuelle, notre cas avec la fourchette haute pourrait ainsi bénéficier d’une aide additionnelle de 3 000€ de la ville.
S’il ne vous donne pas le coût que VOUS devriez supporter pour rénover votre immeuble, cet article donne des ordres de grandeurs. Pour avoir une vision plus précise, vous aurez besoin de réaliser un diagnostic de votre immeuble. Et en ce moment, la réalisation d’un Diagnostic Technique Global est subventionné à hauteur de 5 000€ par la Métropole du Grand Paris. Contactez-nous si vous souhaitez réaliser un diagnostic de votre immeuble.