Dans une étude commandée par la ville de Paris, l’Atelier Parisien d’Urbanisme (APUR) a caractérisé la performance énergétique des logements parisiens. Pour synthétiser les immeubles, l’APUR a classé les immeubles parisiens en 6 catégories.
Nous allons faire 6 articles pour revenir sur chaque grande typologie d’immeuble. Aujourd’hui, pour ce premier article, nous allons voir dans le détail l’analyse de la performance thermique des immeubles parisiens construits entre 1851 et 1914 : ce sont principalement les immeubles communément appelés “immeubles Haussmanniens”. Les immeubles construits durant cette période représentent environ 30% des logements parisiens.
Le contexte des immeubles Haussmanniens
Entre 1851 et 1914, la population parisienne explose, pour passer de 1.6Mn en 1860 à 2.9Mn en 1914. La demande en logement est très forte et l’offre insuffisante, la densité atteint son pic historique. Pour répondre à cette demande, environ 60 000 immeubles sont construits durant cette période, alors qu’il y avait avant cette période 30 000 immeubles.
Porté par une nouvelle conception de la ville et de son rôle social, de nombreux aménagements (comme des grands axes) sont entrepris.
Caractéristiques architecturales
Les immeubles sont construits avec des cours intérieures qui permettent la ventilation naturelle des pièces sur cours (souvent des pièces d’eau). Les immeubles sont construits sous forme de lotissements, ils sont très souvent mitoyens.
Les façades sont en pierre de taille ou en brique, de 40 à 50cm d’épaisseur, la façade sur cour (faite en brique recouverte d’enduit ou en pans de bois) est souvent plus fine, de 25 à 30cm d’épaisseur. Les immeubles varient de R+4 à R+6 avec un ou deux niveaux de combles.
Analyse thermique du bâti
Ces immeubles possèdent de relativement bonnes caractéristiques thermiques. En effet, l’épaisseur des pierres, les ouvertures relativement petites et la mitoyenneté permettent un niveau de confort correct.
Certains ponts thermiques (zone ponctuelle en façade où il y a une variation de résistance thermique, ce qui cause de grosses déperditions thermiques) sont néanmoins causés par l’ornementation des façades, comme on peut le voir sur la photo ci-dessous venant de l’étude de l’APUR :
Les planchers eux n’engendrent pas de ponts thermiques car ils ne pénètrent pas dans la façade. Les murs sur cours, moins épais, ont une déperdition thermique assez forte.
Les murs en pierre ont une grande inertie thermique. En cas de canicule, ces bâtiments mettront plus de temps à s’échauffer, ce qui est une bonne caractéristique.
Ces bâtiments ont été construits avec des cheminées et des conduits pour brancher des poêles. Aujourd’hui, ces modes de chauffage ont été remplacés par du chauffage individuel électrique. A partir de 1870, le chauffage collectif s’est développé. Les immeubles construits avec un chauffage central collectif sont encore en chauffage collectif aujourd’hui.
L’étiquette énergétique des bâtiments Haussmanniens
Quelle étiquette énergétique pour ces bâtiments ? En règle générale, les immeubles chauffés au chauffage électrique auront une étiquette entre E et G. Pour les immeubles chauffés au gaz, il peut y avoir de “bonnes surprises” avec des étiquettes D qui peuvent être atteintes.
Comment améliorer la performance énergétique des bâtiments Haussmanniens ?
L’isolation des façades
Comme pour tous les logements, la question de l’isolation se pose. Étant donné la richesse architecturale de ces bâtiments (qui font partie de l’identité architecturale de la ville), une isolation par l’extérieur de la façade qui donne sur rue n’est pas envisageable. L’isolation par l’extérieur de la façade donnant sur cour est elle envisageable. Néanmoins, un un élément clef est à prendre en compte : l’utilisation d’un isolant perméable (type matériau biosourcé). En effet, comme les pans de bois ou la brique qui constituent la façade sont perméables à l’eau, il faut utiliser un isolant perméable à l’eau pour permettre à l’eau d’évacuer. Sans quoi, de gros dégâts seront causés à la façade.
Quid de l’isolation thermique par l’intérieure ? Là encore, un point d’attention : l’isolation par l’intérieur peut provoquer des phénomènes de condensation dans les murs ou dans l’isolant. Un pare-vapeur doit donc être installé. Second point d’attention : la pose d’un isolant par l’intérieur va entraîner une perte d’inertie thermique qui est défavorable en période de canicule.
En complément d’une isolation, l’installation d’une ventilation mécanique contrôlée sera quasiment indispensable.
Isolation des combles
L’isolation des combles est une mesure simple pour améliorer un peu la performance énergétique d’un bâtiment Haussmannien.
Remplacement des équipements de chauffage
S’ils sont très vieux, le remplacement des équipements de chauffage et l’équilibrage des réseaux peuvent améliorer la performance du bâtiment. Si les radiateurs sont placés sur des parois qui donnent sur l’extérieur, on peut envisager leur déplacement.
Changement des vitrages
Les vitrages en simple vitrage peuvent être remplacés par des fenêtres en double vitrage si cela n’a pas déjà été fait. Parfois, les vitrages sur rue ont déjà été remplacés pour des questions de bruit notamment.
Des travaux, pourquoi pas. Mais à quel coût ? Et pour quels gains ?
Voici venu le temps des questions délicates, mais pourtant clefs.
Évidemment, nous n’avons pas la réponse précise. Mais nous allons vous donner une fourchette pour avoir des ordres de grandeurs afin d’éviter le fameux “Ah. Ça dépend énormément de votre immeuble.”
Supposons que nous engageons le programme travaux suivant :
- Isolation thermique par l’extérieur de la façade sur cour avec un matériau perméable.
- Mise en place d’une ventilation mécanique contrôlée
- Isolation des combles
- Remplacement des simple vitrage en double vitrage.
- Remplacement du système de chauffage
Ces travaux sont conséquents, mais ils peuvent permettre un gain énergétique de 35%, qui débloque certaines aides.
Pour quel coût ? Prenons une fourchette, sur la base des projets recensés par CoachCopro, nous plaçons la fourchette basse à 15 000€/logement, et la fourchette haute à 40 000€/logement. Evidemment, ce sont des coûts moyens, le coût réel dépend de nombreux paramètres dont la taille de l’appartement. Notez que pour des copropriétés de moins de 10 logements, cette fourchette devrait certainement être revue à la hausse.
Alors, oui, entre 15 000 et 40 000€ par logement, c’est une fourchette de géant, mais on va quand même descendre les calculs en prenant une approche complète.
Vous trouverez ci-dessous la synthèse, qui prend en compte :
- Les aides nationales
- L’exonération de taxe foncière sur 3 ans
- La plus-value liée à la valeur verte du logement. 2% à Paris entre un appartement avec une étiquette F ou G et un appartement avec une étiquette D
- Le recours à l’éco-prêt à taux zéro
On voit que pour certaines opérations, en prenant en compte les aides, l’exonération de la taxe foncière et la valorisation du patrimoine, l’opération est bénéficiaire ! Dans les cas où la quote-part travaux est plus élevée, le reste à charge est de l’ordre de 20 000€ pour un logement. Ce qui représente un effort mensuel moyen de 90€/mois sur 15 ans.
Une autre manière de voir la chose : les aides (aides collectives et exonération de taxe foncière) représentent entre 23% et 41% du coût des travaux ! Vous n’êtes jamais autant aidé lorsque vous refaites votre cuisine ou votre salle de bain…
Une comparaison que l’on n’a pas faite ici mais à avoir en tête lorsque vous prenez une décision sur la rénovation de votre immeuble : comparer le coût du ravalement qui embarque la rénovation énergétique avec le coût du ravalement simple. On peut parfois être surpris de l’écart (dans le bon sens !)
A noter, d’autres dispositifs d’aides existent. Pour les propriétaires bailleurs, d’autres dispositifs peuvent être sollicités. Pour les propriétaires occupants aux ressources modestes et très modestes (cf tableau de ressources ci-dessous), des aides individuelles peuvent également être sollicitées. La ville de Paris propose aussi certaines aides : à l’heure actuelle, notre cas avec la fourchette haute pourrait ainsi bénéficier d’une aide additionnelle de 3 000€ de la ville.
S’il ne vous donne pas le coût que VOUS devriez supporter pour rénover votre immeuble, cet article vous donne des ordres de grandeurs. Pour avoir une vision plus précise, vous aurez besoin de réaliser un diagnostic de votre immeuble. Et en ce moment, la réalisation d’un Diagnostic Technique Global est subventionné à hauteur de 5 000€ par la Métropole du Grand Paris. Si vous souhaitez réaliser un diagnostic de votre immeuble, contactez-nous.